Décrite pour la première fois en 1858 sur des bagnards de l’île du Diable, la Lucilie bouchère (Cochliomyia hominivorax) est présente sur la quasi-totalité du continent sud-américain. Cette mouche carnivore a pour particularité de pondre uniquement sur des animaux vivants.
La moindre micro-blessure est susceptible d’attirer la femelle, qui dépose entre 10 et 400 oeufs en bordure de la plaie (un paquet blanchâtre de forme d’ovale). L’éclosion se produit en une douzaine d’heure et les asticots (encore appelés “vers à vis” ou “screw-worm” en anglais) s’enfoncent directement dans la chair dont ils se nourrissent, provoquant de gros dégâts dans les tissus et creusant des cavités de plusieurs centimètres de profondeur (jusqu’à 10 cm chez les bovins). Il s’agit d’une myiase (parasitose de la peau par des vers) très dangereuse si elle n’est pas prise à temps.
La croissance des vers dure 4 jours, pendant lesquels ils se nourrissent des chairs, sous la peau. Les larves sécrètent des composés qui empêchent la cicatrisation de la plaie dont l’odeur attire d’autres mouches. C’est un enchaînement infernal qui peut tuer un animal en 15 jours, avec des infections secondaires. Une fois repus, les asticots (qui mesurent un centimètre) sautent hors de l’animal pour s’enterrer dans le sol et se transformer en pupe, puis en mouche.
La prévention est la meilleure arme. En Guyane, la mouche sévit une bonne partie de l’année : des cas ont été répertoriés en mars, juin, septembre, octobre, novembre. Les vétérinaires en voient alors jusqu’à dix par jour… Chez les animaux de compagnie, une simple piqûre de tique est souvent la porte d’entrée pour la Lucilie bouchère. Pour le bétail, l’ombilic des nouveaux-nés est très souvent pris pour cible. Il convient donc de lutter activement contre les tiques et de surveiller/nettoyer/désinfecter les plaies quotidiennement si votre animal (un chien, typiquement) passe du temps dans le jardin.
Peu visible les premiers temps (vérifier les grosseurs suspectes et les agglomérats d’oeufs), l’infestation se reconnaît aisément au bout de deux ou trois jours : un trou circulaire aux bords net, empli de liquide rosâtre et d’asticots orientés verticalement en rangs serrés. Il faut intervenir très vite pour empêcher l’élargissement et le creusement de la plaie : la cavité peut doubler de volume du jour au lendemain !
Les Brésiliens, confrontés régulièrement à ce problème, disposent de spécialités vétérinaires en spray (appelées communément “matabicheiras“) produites par des laboratoires en vue comme Fort Dodge ou Merial : très efficaces, elles sont malheureusement interdites de commercialisation en Europe… Vous ne les trouverez pas dans les magasins en Guyane.
A défaut, le seul remède d’urgence consiste à pulvériser un insecticide anti-cafards directement dans la plaie. Les larves sont tuées et remontent vers la surface : les retirer toutes à l’aide d’une pince à épiler préalablement désinfectée. Réitérer l’opération jusqu’à ce que la plaie soit vidée. Laver l’animal pour éliminer les saletés et les odeurs, puis désinfecter la plaie en y versant de l’eau oxygénée (laisser mousser), puis de la Bétadine.
Consultez votre vétérinaire sans attendre ! Prises dans les premiers jours, les infestations à Lucilie bouchère ont un bon pronostic et l’animal cicatrise en une quinzaine de jours, avec des soins biquotidiens. NE JAMAIS RAMENER UN ANIMAL INFESTÉ EN MÉTROPOLE (ou ailleurs) ! un check-up approfondi s’impose avant de quitter la Guyane.
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